Homélie du 6ème
dimanche année C 2019 à partir de l'évangile
de Saint Luc chap.6, 12, 17-26
Plutôt subversif ce Jésus par rapport aux évidences du monde
où nous sommes plongés !:
la publicité ne cesse de nous seriner que le bonheur, c'est
de gagner au super-Lotto, de jouir de vacances aux Bahamas et de se faire
valoir par telle marque de parfum ou de voiture.
Aujourd'hui, Jésus serait-il membre du PTB ?
Revoyons la scène !
Jésus -nous dit Luc-
s'en alla dans la montagne pour prier et il passa la nuit à prier Dieu.
Il a pris en lui le regard de Dieu !
Avec les Douze, il descend dans la plaine...
Et que voit-il ? Une foule de gens réellement pauvres,
qui ont faim concrètement 'maintenant', qui souffrent 'maintenant' ;
et lui 'qui n'a même pas une pierre où reposer la tête'
et qui va mourir nu, dans l'intense souffrance, le mépris, l'extrême pauvreté d'un crucifié,
il s'identifie à eux : il est le 'Messie des
pauvres' !
Dès le VIII ème siècle
avant lui, tout un courant spirituel ,avec certains prophètes, porte
l'espérance des laissés-pour-compte en Israël, réellement exploités, méprisés
par les riches propriétaires, les 'rieurs' qui se moquaient bien de
Dieu ;
et eux, les petits, les 'anawim' comme on les
appelait, ils ne peuvent compter que sur Dieu pour leur survie, ils espèrent
depuis longtemps un Messie qui les rendrraient à leur dignité.
Remarquons que Jésus -quoi qu'on en ait dit- ne 'maudit' pas
les riches !
'Ouai !' écrit quatre fois le texte grec de
l'évangile : 'Aïe, aïe, aïe !',vous les riches, les repus ,
les 'rieurs' maintenant', ce qui fait votre assurance, votre arrogance
maintenant, ne passera pas la ligne d'arrivée !
Les quatre plaintes que Jésus
a pour les riches, (comme souvent
les assertions négatives dans le nouveau testament) servent surtout à mettre en
relief par contraste, le grand Bonheur promis aux petits, ou plus exactement la
chance de Bonheur qui les attend !
Car il ne suffit pas d'être misérable pour accueillir
automatiquement ce Bonheur que Jésus apporte : il faut encore lui faire
confiance !
Heureux 'asherei' (en araméen) se traduit aussi 'en
avant !'
Jésus ne béatifie pas la misère où croupissent les SDF de son
temps : la souffrance peut à la longue durcir le coeur ! Lui, il
combat le Mal, l'injustice, il soulage, il libère de l'emprise des
démons ...
Mais il invite les pauvres à aller de l'avant : il y a
un Avenir pour eux ; : le Royaume déjà présent en lui.
Asherei donc ! En avant !
Et il y a toujours eu dans le courant des pauvres en Israël
une dimension spirituelle : ce sont 'les pauvres de Yahvé'.Ainsi la
présentation des Béatitudes chez Luc et celle -moins abrupte- de Matthieu se
rejoignent en quelque sorte :
la pauvreté réelle invite à avoir un coeur de pauvre qui
compte sur Dieu,
la faim qui tenaille le corps peut ouvrir à la faim de
l'Essentiel (le jeûne du Carême nous le rappellera dans quelques semaines).
Cette faim-là, ce grand Désir de Bonheur qui nous habite
tous, Dieu seul, Jésus seul, peut le combler : nous sommes faits pour
cela !
Et parfois -certains d'entre nous peuvent en témoigner- au
creux-même de nos épreuves assumées en communion à Jésus, à son mystère pascal,
un filet de pure joie ou d'une paix profonde peut surgir inattendu, et vient anticiper l'immense Bonheur qui nous
attend.
Bref ! L'expérience chrétienne rejoint le regard et la
Parole de Jésus :
le bonheur durable et profond n'est pas dans l'Avoir toujours
plus, dans le Pouvoir auquel on s'accroche, dans la vanité du Paraître !
Mais bien dans une relation confiante et toujours plus vive,
plus priante au Seigneur de notre vie, dans un amour plus concret pour ceux qui
nous sont proches, plus généreux, qui s'élargit même aux ennemis (insistent les
versets qui suivent). Le Bonheur est dans l'espérance 'en avant' !
Avec Marie- dans l'étonnement du grand Amour qui l'a
atteinte, et qui nous atteint- nous pouvons chanter à Dieu : Le
Puissant a posé son regard sur son humble servante. Il a fait pour moi de
grandes choses. Désormais tous les âges diront mon Bonheur !
Les riches, il les renvoie les mains vides, les puissants,
il les détrône, mais les humbles, il les élève et ceux qui ont faim, il les
comble de sa Présence :
SAINT EST SON NOM !
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